LA VIE EN PAYS ISAN AU NORD DE LA THAILANDE VU DE L INTERIEUR
25 Avril 2010
Plusieurs dizaines de milliers d'expatriés n'hésitent pas à tout laisser tomber pour venir vivre avec leur épouse thaïlandaise, souvent dans la région
d'Isaan. Pourtant, certains n'arrivent pas ou ne veulent pas s'adapter à leur nouvel environnement, tandis que d'autres finissent par s'éloigner de la communauté expatrié dans laquelle ils ne se
reconnaissent pas
Nombreux sont les étrangers qui décident de changer de vie
et de venir s'installer dans la région d'Isaan, l'une des plus pauvres de la Thaïlande (Photo DR)
Dans ce que les Thaïlandais surnomment en plaisantant "la rue des occidentaux", Justin Raines rigole autour d'une bière avec sa fiancée thaïlandaise enceinte, Eve, qui a 21 ans, la
moitié de son âge. "Cela n'a pas d'importance que vous soyez gros, moche ou quoique ce soit d'autre, vous trouverez toujours une femme ici qui voudra prendre soin de vous", explique
Justin avec un sourire. Neuf ans plus tôt il a déménagé du Queensland (Australie) dans la région de l'Isaan afin d'être avec sa première compagne thaïlandaise, qu'il a rencontré lors d'un voyage
à Bangkok. Le couple s'est ensuite séparé, mais Justin explique qu'il est tombé amoureux d'Udon Thani, une des principales villes d'Isaan, où il a ouvert un bar et rencontré sa nouvelle dulcinée.
"Les femmes d'ici sont les plus belles de Thaïlande, celles d'Isaan, et économes aussi. Il est moins cher de vivre ici que dans d'autres endroits tels que Bangkok, Pattaya et Phuket",
précise-t-il.
L'Isaan, région phare des couples interculturels
Les vacanciers en Thaïlande s'aventurent rarement en Isaan, l'une des régions les moins prospères du royaume, et où les exploitations fermières sont plus communes que les hôtels fastueux et les
plages paradisiaques du sud. Pourtant, beaucoup d'étrangers semblent partager l'enthousiasme de Justin. Lui et Eve font partie des quelque 60 à 70.000 couples interculturels recensés dans la
région, selon Buapan Promphakping, professeur associé dans le développement social à l'université de Khon Kaen. La tendance a commencé dans les années 60 lorsque plusieurs milliers de soldats
américains ont été stationnés dans la région durant la guerre du Vietnam. Mais elle a ensuite continué au même rythme, d'autant que beaucoup de femmes pauvres d'Isaan ont quitté leur foyer pour
trouver du travail dans les zones touristiques – souvent en tant que fille de bar – où elles peuvent rencontrer des hommes étrangers et les pousser à s'installer dans le nord-est. La fiancée de
Justin, explique que "le rythme de vie est facile" avec son mari occidental, qui l'aide même à faire la vaisselle, et avec qui elle gère une petite entreprise de textile. Mais la
socialisation de Justin avec ses compagnons expatriés est un point sensible. "Il n'est désormais plus célibataire et quand il sort la nuit, il reste avec eux jusqu'au matin. Ce n'est pas
acceptable, alors nous nous bagarrons régulièrement", raconte-t-elle.
Entre piège, idylle et réalité
Il peut aussi y avoir une partie plus sombre pour les deux partenaires engagés dans ces unions, où les écarts d'âges sont communs, et dans lesquelles les lois thaïlandaises poussent les
occidentaux à acheter une maison au nom de leur femme. "A quel point faut-il être intelligent pour se rendre compte que cela peut être un piège?", déclare John Burdett, avocat anglais
devenu romancier après avoir longuement interrogé les filles de bars en Isaan pour écrire ses livres. Mais pour lui, les mariages entre occidentaux et thaïlandais peuvent, cependant,
"fonctionner formidablement bien", et souvent fournir une sécurité financière pour la famille de la femme si le couple a une bonne approche. "C'est une question qui concerne les deux
parties, en particulier les hommes, comprendre que c'est une culture très différente et que si vous voulez une relation durable, vous devez faire un effort d'adaptation", ajoute-t-il.
Vivre avec les locaux plutôt qu'avec les expatriés
C'est justement ce qu'essaye de faire Ronnie Behnke, 37 ans, qui vient de quitter Brisbane pour rejoindre le village tranquille de sa compagne Parnom, dans la province de Khon Kaen, où le couple
a mis en place un élevage de poisson. "Je pénétrais dans une jungle, vous entendez un tas d'histoire à propos de gens qui se font dépouiller", explique-t-il. "J'ai emménagé étape par
étape afin d'être sûr que c'est ce que je voulais faire". Ronnie explique qu'il a rencontré son épouse de 26 ans dans la station balnéaire de Pattaya en 2003, où il était en vacances alors
qu'elle travaillait comme femme de ménage, mais sa première visite dans le nord-est a été comme un choc. "Sa famille n'avait rien. Les toilettes étaient une honte alors je les ai réparées
ainsi que la douche", se rappelle-t-il. "Quand je suis arrivé ici et que j'ai vu ces gens qui n'ont rien à donner, mais qui donnent quand même, j'ai pensé: ce sont des personnes que je
veux aider". Ronnie espère que sa ferme va permettre d'améliorer l'économie du village, et il offre aussi des conseils aux visiteurs occidentaux sur la culture de l'Isaan en tant que
volontaire dans la police touristique. "Maintenant que j'ai un filet de secours, que j'ai un groupe de personnes en qui j'ai confiance, je me sens en sécurité". Par ailleurs, bien qu'il
admette que ses compétences en thaï sont encore basiques, Ronnie explique qu'il préfère sortir avec les locaux plutôt qu'avec la communauté expatriée. "C'est une honte car vous voyez un tas
de piliers de comptoirs qui n'ont rien de mieux à faire que d'aller boire toute la journée et revenir harceler leur épouse. Parfois j'ai envie de dire: il y a l'aéroport, allez-vous en si vous
n'aimez pas cet endroit", explique-t-il. Quant à sa femme Parnom, elle semble heureuse avec son choix de partenaire. "Je pense que j'ai trouvé un homme bien, vous savez, il prend soin de
moi. Je pense que je suis heureuse avec ça. C'est simple!", déclare-t-elle en rigolant.
(http://www.lepetitjournal.com/bangkok.html avec AFP) jeudi 22 avril
2010